En introduction, je dirais que je viens de lire un très intéressant article sur la problématique du manque d’invitation des cavalières dans nos bals: lien
C’est une réalité, une vraie difficulté pour laquelle il serait bien de trouver des solutions, mais je souhaiterais discuter avec vous d’un autre problème, la nature de l’invitation… Mes écrits seront sujets à controverse, c’est ce qui permettra la richesse de l’échange qui en découlera, j’espère. .
Je commencerai par quelques évidences, mais qui ne le sont pas pour tout le monde… . Tout d’abord, une invitation au tango lors d’un bal c’est quoi ? (ou devrait théoriquement être)
– Une « proposition » de danser une tanda entre une femme et un homme (ou un guideur et un guidé)
– Une « proposition » de partager un moment agréable à deux
– L’engagement d’être correct et respectueux durant cette tanda (pas de commentaires, pas de professorat).
Qu’est-ce que ce n’est pas ? (ou ne devrait pas être)
– Une obligation de danser pour celui ou celle qui est invité
– Un moment égoïste dans lequel on ne danse que pour soi et montrer comme on danse bien
– Un effort que l’on fait et que l’on fait sentir
– Un cours que l’on donne à l’autre
– Une obligation de redanser la tanda suivante avec celui qui vient de nous inviter.
Ensuite, une invitation comment cela peut se passer ? avec quels avantages et inconvénients ?
– Mirada et Cabeceo: L’homme capte le regard d’une femme qu’il souhaite inviter, elle acquiesce d’un petit geste du visage, il confirme de la même façon qu’il s’agit de la bonne personne. Ils se rejoignent sur la piste, ou pour les plus formels il va la chercher à sa table.
Commençons par les inconvénients : il faut avoir une bonne vue, il faut que la salle soit bien disposée, il faut que la salle soit suffisamment éclairée, il faut que le DJ ajuste le temps des cortinas au temps de replacement des danseurs afin d’éviter que les personnes qui sont sur la piste soient privilégiées pour redanser.
Maintenant les avantages :
– La femme est libre de refuser d’une façon très élégante, elle baisse le regard, regarde ailleurs ou fait simplement semblant de ne pas avoir vu.
L’homme qui n’est pas arrivé à inviter une danseuse ainsi ne peut pas savoir si c’est un refus (qui pourrait le vexer s’il est susceptible !) ou pas.
Une femme qui souhaite se faire inviter par un danseur peut chercher son regard, c’est la mirada inversée et toutes les danseuses aguerries que je connaisse la pratique assidûment. Dans ce cas, l’équilibre homme/femme est rétabli. Et les hommes qui ne veulent pas se faire inviter n’ont qu’à baisser le regard.
Notons que lors d’une invitation du regard, on peut s’approcher afin de faciliter la réception du message par la personne invitée, l’idée étant de ne pas se mettre devant mais de rester à quelques mètres au moins.
– Invitation verbale: L’homme ou la femme invite l’autre personne en lui demandant de danser (voire en lui imposant verbalement de danser)
Avantage pour la personne qui invite : Une pression s’applique sur la personne invitée qui sera gênée de refuser ! o Désavantage pour la personne qui invite : Elle sera un peu vexée si la personne invitée refuse. Encore plus si elle a dû traverser toute la salle afin de procéder à l’invitation.
Avantage pour la personne invitée : Elle n’a pas besoin d’avoir une bonne vue.
Désavange pour les deux personnes : En cas de refus, la danseuse peut se sentir obligée d’inventer une excuse, puis si elle est invitée ensuite par quelqu’un d’autre avec qui elle a envie de danser, l’homme précédent sera probablement vexé… Malheureusement c’est lui qui aura provoqué cette situation.
Cette forme d’invitation orale devrait être réservé à ses amis proches et avec pour contrat d’accepter le refus sans discussion si refus il y a. . A travers ces évidences que je viens de lister, on voit qu’il y a moyen d’être élégant, de se protéger, de protéger l’autre en modifiant ses habitudes d’invitation, en réfléchissant un peu aux conséquences…
Enfin je voudrais insister sur une pratique désolante que je remarque de plus en plus et ce, dans toutes nos milongas Toulousaines. Le sentiment par certains hommes que la femme n’a pas le droit de ne pas avoir envie de danser avec eux et qu’ils se croient tout permis pour arriver à convaincre la danseuse de danser. A ces hommes à l’égo surdimensionné, j’aimerais faire comprendre qu’une danseuse peut refuser de danser avec eux:
– A un instant précis (car elle est fatiguée, la musique ne l’inspire pas, elle discute, elle a déjà assez dansé avec cette personne ce bal-ci ou le bal précédent, elle s’économise pour danser avec certains danseurs avec qui elle a très envie de danser ce soir là). Et cela ne veut pas dire qu’elle n’adore pas danser avec le danseur qui l’invite… Simplement adorer danser avec quelqu’un ce n’est pas devoir accepter de danser avec lui chaque fois qu’il en a envie! Bien accepter un refus c’est augmenter dans l’estime d’une danseuse et pas le contraire…
– Tout le temps ou pour une durée certaine (elle n’aime pas danser avec lui, il lui a fait mal la dernière fois, il a eu un comportement déplaisant (et c’est très subjectif, toutes les danseuses n’aiment pas qu’on les prenne par la taille à la fin d’une tanda par exemple), il l’a monopolisée lors du dernier bal, il a confondu tanda et rencontre amoureuse). . Bien sûr ces propos sont aussi valables pour une femme qui inviterait un homme…
Malheureusement, certains danseurs/danseuses n’arrivent pas à comprendre cela et deviennent insistant, voire très insistant, râlent, émettent des semblants de menaces (« je m’en rappellerai… ») à l’encontre des danseuses, qu’ils n’ont évidemment pas invité du regard (sauf parfois à 40cm !).
Cette pratique, en plus de totalement manquer d’élégance, a des conséquences sur les danseuses, qui finissent par avoir envie de se cacher parfois, voire vont dans les coins de la salle, qui perdent le plaisir de danser avec ces danseurs car elles se sentent obligée… C’est vraiment dommage !
Une invitation ne devrait jamais être une obligation d’acceptation, c’est la base. Un refus de danser ne devrait jamais mener à des représailles ou une négociation… même gentille. C’est la liberté de danser, donc de se faire plaisir, et d’accepter que l’autre puisse aussi se faire plaisir qui devrait toujours nous guider dans la danse sociale qu’est le Tango Argentin.
Je conclurai par une réflexion personnelle que je me fais souvent. Je ne sais pas si elle est partagée mais j’aimerais bien le savoir ;-). Je ne danse pas avec tout le monde, je n’invite pas toutes les danseuses, et j’ai souvent peur que ce soit mal interprété, que certaines croient que je pense que je juge leur tango et m’estime meilleur… Ce n’est aucunement le cas !!!
Simplement :
– Je danse pour mon plaisir, qui est de partager une tanda de Tango Argentin (ou valse ou milonga) qui m’inspire, avec une danseuse avec qui j’aimerais partager « cette tanda » (pas une autre). Je cherche donc à partager un moment de ma passion avec quelqu’un, c’est très très subjectif, et le choix de la personne est vraiment complexe (voire trop complexe pour moi !). Il y a des paramètres humains, des paramètres physiques, des paramètres tango (type d’abrazo, façon d’interprêter la musique, complexité des embellissements , …), il y a aussi des danseuses que je pense que je ne serai pas capable de guider correctement, d’autres qui ont un tango trop riche ou trop avancé pour moi, d’autres qui débutent et que je ne me sens pas encore assez expérimenté pour guider correctement si elles ont du mal, d’autres qui m’ont fait mal au dos simplement parce que nos morphologies et tango ne vont pas bien ensembles…
– Donc ce qui fait que j’invite telle ou telle danseuse n’est pas qu’elle danse bien, qu’elle soit belle, jeune, moche, agée, … C’est bien plus complexe, c’est même parfois par manque d’éléments et parce que j’ai trop peur de mal faire et de faire passer un mauvais moment à la personne que je n’invite pas.
Voilà… Je ne sais pas si vous aurez eu la patience de me lire jusqu’au bout mais ce fut un plaisir que de partager ces pensées.
Jean-Christophe
Nbre de lectures publication originale: 4318
Commentaires publication précédente:
Geraldine (non vérifié)
dim, 15/12/2013 – 19:52
Herr Mann
lun, 16/12/2013 – 08:26
Hubert
lun, 16/12/2013 – 09:20
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 09:44
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 09:58
Hubert
lun, 16/12/2013 – 09:58
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 10:04
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 10:13
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 10:14
claudio
lun, 16/12/2013 – 10:26
à JeanChris, Je pense que les lecteurs sauront discerner un trait d’humour et « juger » de la pertinence de cette vidéo. Le sujet est important, d’actualité, et suscite des réactions. C’est cela qui est intéressant.
Chacun le traite ensuite avec le niveau de gravité adequat.
Anonyme (non vérifié)
lun, 16/12/2013 – 10:50
Cricou
lun, 16/12/2013 – 11:04
Echanges très intéressants.
J’abonde tout à fait dans les sens de Jean-Christophe : une personne [ peu importe laquelle : homme ou femme, guideur(se) ou guidé(e) ] en sollicite une autre, qui répond positivement ou s’esquive, puis on va l’un vers l’autre, d’un même pas consentant (à la limite, pour les plus traditionnels, l’homme sedéplace le premier, peu importe là aussi).
Personnellement et cela m’est arrivé plusieurs fois hier soir ainsi qu’à Tres la veille, je me sens invité par de tels regards (qui ne ressemblent pas à cette vidéo totalement contre-productive) et si j’accepte, je sais parfaitement que je ne suis pas l’inviteur Hubert, ce qui me fait diablement plaisir (à chacun ses fragilités et ses doutes). J’ai un peu plus de mal à refuser mais bon il va falloir m’y résoudre parfois car pour les valses, je sais avecqui j’ai envie de danser et du coup, parfois je n’en ai plus le temps.
RateauMan (non vérifié)
lun, 16/12/2013 – 12:01
Tout d’abord, merci pour ces échanges que je lis avec gourmandise et respect pour leurs auteurs inspirés.
Personnellement, j’ai toujours eu du mal avec le cabécéo (à mon age, faut sortir les lunettes et viser entre les danseurs… et puis j’ai l’impression que soit je suis pas doué pour l’exercice, soit mon tango n’est pas apprécié…bref ça marche pas vraiment)
Par contre, je pense qu’il faut admettre plusieurs modes d’invitation pour relacher le « cabécéo stress »
=> il et elle discutent un moment de choses et d’autres, c’est sympa, et mieux qu’un échange muet, puis il ou elle propose un tour de piste.
=> La ou le DJ proposent une ou plusieurs tanda » à l’américaine », et on joue le jeu : seulement les femmes invitent.
=> La milonga comporte toujours une tanda festive rebattant les cartes de l’invitation formelle (tanda del bonbon, tanda « jeu de cartes »…etc
Après, bon le rateau ça fait partie du jeu et c’est pas la mort qui tue :
un bon rateau de temps en temps, ça dégonfle un peu le cerveau…
Jean-Jacques
Herr Mann
lun, 16/12/2013 – 12:58
Je me rappelle d’une milonga où les organisateurs ont une fois institué le principe selon lequel pour l’occasion c’était les filles qui invitaient. Les hommes allergiques au principe avaient peut etre du s’abstenir mais la fréquentation n’était pas moindre.
Que s’est il passé? Les femmes n’ont pas invité! Donc, au bout d’un moment, ce sont les hommes qui ont fait les invitations.
Ce qui prouve à mon sens deux ou trois choses:
-que les gadgets du style tanda américaine, tanda bonbec,etc… n’ont pas d’efficacité du fait qu’elles sont largement artificielles
-que l’évolution des mentalités que certains appellent de leurs voeux n’est certainement pas à attendre que des hommes
-que là aussi, il y a une inégalité entre les femmes, entre celles qui osent et celles qui n’osent pas. Et que en fin de compte il y a fort à parier que quoi qu’on fasse, il y aura toujours des filles qui ne danseront pas, et ce seront toujours les memes qui resteront coincées sur la banquette (bonnes danseuses ou débutantes, d’ailleurs, en la matière, il n’y a pas de déterminisme)
Par contre pour rebondir ce que disait Jean Christophe, je confirme que mirada et cabeceo donnent largement autant d’initiative à la femme que l’homme. J’ai connu le refus de cabeceo (c’est pas grave, et en plus c’est discret et pas embarassant) et je l’ai pratiqué aussi (c’était pas grave et c’est tout aussi discret et pas embarrassant). C’est pas un truc uniquement destiné aux milongas ou encuentros fréquentés par des intégristes milongueros, ça se pratique dans plein d’endroits y compris dans les marathons, meme si les intégristes précités croient que c’est là la principale différence.
Enfin, il faudrait une bonne fois pour toutes que chacun intégre qu’un refus d’invitation (directe ou par cabeceo) n’est pas un refus ad vitam aeternam, mais simplement que ce n’est pas le moment adéquat : fatigue de l’intéressé(e), envie de continuer une discussion plutot que d’aller danser, envie de danser avec quelqu’un d’autre, pas la bonne tanda, sensation qu’on n’est pas à ce moment là en mesure de donner à l’autre l’engagement dans la danse qu’il faudrait, envie de pipi, de clope, de boire un coup, on a l’épaule ou le dos démonté par le/la partenaire malhabile de la précédente tanda, etc… Et que peut etre la meme personne est susceptible de vous solliciter à un autre moment de la milonga, ou de l’année, dans d’autres circonstances, etc…
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 13:58
Je crois effectivement que ce n’est pas une histoire de gadget comme le dit Herr Mann… par contre, un travail de fond (avec parfois des gadgets pour aider) pourrait peut-être faire avancer les choses, tout au moins pour les personnes les plus timides ou celles qui ne le sont pas mais qui ne savent pas vraiment comment faire.
Pour fréquenter les marathons et les encuentros, je ne pense pas que les personnes y allant pensent en avoir l’exclusivité, par contre, elles savent s’en servir et éviter ainsi tous les mauvais sentiments.
Pour l’exemple, quand je vais ailleurs que dans un marathon ou un encuentro, soit des festivals (pas des milongas locales), je n’invite que du regard, c’est bien plus simple et facilitant quand on ne connait personne. Par contre, je regrette chaque fois de ne pas avoir invité les danseuses locales qui ne sortent jamais de leur ville, et c’est souvent le seul mauvais sentiment qui ressort de ces sorties hors de Toulouse, hors marathons, hors encuentros.
Apprendre aux non-initiés (hommes ou femmes) à inviter discretement du regard, c’est possible et c’est aussi un peu le rôle de ceux qui ont soit l’expérience de BsAs (ce qui n’est pas mon cas) ou des grands événements européens… A vous de jouer mes amis…
(Je le fais souvent, et en expliquant bien qu’il ne s’agit pas d’un extrêmisme porteño mais d’un moyen de faciliter et promouvoir les invitations entre personnes qui ne se connaissent pas).
JeanChris
lun, 16/12/2013 – 14:07
Si je te suis (Je parle à Anonyme ;-)), quand un homme lance des regards à une femme, c’est bien elle qui choisi non « en fin de compte »?
En tout cas, c’est ce que tu viens d’écrire en disant « les femmes te lancent des regards, comme tu le dis toi-même, donc tu as le choix »
Cette rhétorique me semble complètement stérile, le ton aussi… Je ne ferai donc pas de caricature de mon côté ;-). Tout ce que j’essaie de faire, c’est avancer le schmilblic et éviter que certaines personnes partent des milongas en se sentant mal, amoindries, vexées, seules, ….
Donc, promis, je ne parlerai plus (aux femmes), d’ailleurs mon article était surtout destiné aux hommes (qui forçaient les femmes à danser) !
Cricou
lun, 16/12/2013 – 16:32
Herr Mann
Tu écris « que les gadgets du style tanda américaine, tanda bonbec,etc… n’ont pas d’efficacité du fait qu’elles sont largement artificielles »
D’accord ce sont des « gadgets » si on veut dénigrer, mais aussi des outils si on veut positiver.
Perso, j’en ai 3 expériences favorables :
à Sueño Porteño, la milonga de Julia Pugliese » à Buenos Aires : tandas des bonbons (les femmes invitent) et tanda des roses (les hommes invitent) marchent parfaitement bien, c’est même une ruée sympathique !
place Arnaud Bernard lors de Tangopostale 2012, la soirée avait été baptisée « Sueño Porteño » et nous avions diffusé un message de Julia sur ces thèmes, franc succès également pour les bonbons
lors des week-ends « Tango entre amis » organisés à Lloret de Mar chaque année, même chose pour la tanda des bonbons
Ce que je pense c’est que cela ne fonctionne que dans un environnement favorable, notamment par implication du DJ et de quelques personnes qui font « prendre la sauce ».
Ce que j’espère c’est qu’un jour nous n’en aurons plus besoin et que seule demeurera la tanda des roses (« vieux jeu » ?, bon peut-être, si vous voulez, on en reparlera).
Quant au cabeceo, il ne faut pas s’en faire un monde, l’important c’est la mirada (mais qu’est-ce qu’un regard sans sourire ?), on peut s’approcher disons jusqu’à 3 m si on n’y voit pas bien (mais pas en traversant la piste de face !) et le petit geste de la tête n’est là que pour confirmer, rassurer la personne que l’on invite ou qui nous invite et seulement si l’on sent qu’un doute demeure.
Herr Mann
lun, 23/12/2013 – 08:20
Pour ceux que le sujet de l’invitation taraude, et pour l’édification de ceux qui ont une vision paternaliste de la situation des femmes dans la milonga : je recopie ici ce que j’ai trouvé sur un blog (http://www.partenaire-danse.fr/blog/comment-refuser-danse-16.html). Manifestement c’est un point de vue féminin qui s’exprime, et l’enfer de l’invitation semble etre à double sens…
Comment refuser une danse
Si certaines personne prient toute la soirée pour être invitées, d’autres se demandent quelles stratégies adopter pour ne pas devoir danser avec tel ou tel danseur. Refuser maladroitement une danse comporte des risques dans le monde de la danse sociale où la politesse est de mise. Si le tango avait établi une règle intéressante en milonga, préservant à la fois le danseur de l’humiliation d’un refus visible par tous et permettant à la danseuse de sélectionner ses invitations grâce au subtil jeu du regard (si la femme assise là-bas vous détourne le regard, c’est non, inutile d’aller l’inviter), il vous faudra la plupart du temps faire appel au simple bon sens.
Les risques de (trop) refuser
Subir un refus peut être démoralisant, surtout pour un débutant. Certaines personnes pensent qu’il est normal pour un homme d’être rejeté, qu’il en a l’habitude, que son ego ne sera pas altéré par un refus supplémentaire. Détrompez-vous. Si des danseurs aguerris n’en n’ont effectivement que faire, beaucoup d’hommes ont la hantise du « rateau » et hésitent à inviter s’ils présentent la probabilité d’un refus. En vous épargnant trois minutes de danse, vous pouvez ruiner la soirée d’une personne. Au passage, pour cette raison, un homme ne devrait tout simplement jamais refuser l’invitation d’une femme. Elles sont d’ailleurs très rares à inviter, certaines pensant que l’étiquette de la danse sociale ne l’accepte pas (ce qui était sans doute vrai autrefois), alors qu’en général, les hommes adorent vraiment qu’on les invite.
Le second risque est celui de devenir… « blacklistée ». Un danseur auquel vous avez dit non viendra rarement retenter de vous inviter. Même en ayant entendu « Pas cette danse, parce que ceci ou cela », il peut avoir interprété « Jamais de la vie avec vous ». Si vous ne vouliez effectivement pas danser avec lui parce que c’est… lui, pas de problème. Sinon, il vous faudra à votre tour l’inviter par la suite.
De plus, n’oubliez pas que vous êtes observée par les autres danseurs. Refuser une danse à un mauvais danseur en vous disant que cela vous laissera disponible pour accepter l’invitation d’un bon danseur est un mauvais calcul : le bon danseur, voyant que vous venez de refuser à un autre, risque de ne pas se lancer puisqu’il ignore la raison de votre refus. Il pourrait même être gêné pour l’autre danseur : une danseuse qui refuse une danse ne devrait surtout pas danser ce morceau avec un autre.
Bref, soyez discrète dans votre refus, ne vous faites pas identifier comme étant difficile si votre objectif est de continuer d’être invitée en soirées. Une danseuse connue pour accepter systématiquement, même au bord de l’épuisement, même complètement transpirante, même avec le plus débutant des débutants sera de plus en plus invitée.
L’esquive
Une manière de ne pas avoir à refuser et d’éviter d’être invitée en ne laissant pas le danseur vous approcher. Vous pouvez faire semblant d’être occupée en discutant avec quelqu’un. Une conversation apparemment absorbante qui ne vous laisse même pas remarquer qu’un danseur s’approche de vous. Vous interrompre serait alors malpoli. Cela fonctionne parfois, mais pas toujours, il est difficile en effet de faire croire qu’une conversation est plus importante qu’une danse lorsque l’on va dans une soirée dansante… Vous pouvez aussi vous déplacer en donnant l’impression de chercher du regard quelqu’un que vous connaissez. Ou tout simplement, vous diriger à l’opposé de la personne, voire quitter la piste, pour aller au bar ou aux toilettes. Cela fonctionne pour une danse mais n’empêchera pas le danseur de retenter sa chance plus tard…
La vraie excuse
Sachez que peu de danseurs vont croire à votre excuse, même si elle est légitime. Car trop de fausses excuses tuent les vraies excuses. Mais peu importe, vous avez le droit d’avoir mal aux pieds, d’avoir besoin de boire, d’avoir une envie pressante, de faire une pause. Alors, un simple sourire avec un « Désolée, je ne peux pas car… » suffira. N’oubliez pas d’aller inviter le danseur quand vous serez en état, pour qu’il comprenne que l’excuse était réelle.
La fausse excuse
Nous sommes en général entre gens de bonne éducation alors la fausse excuse est un moindre mal plutôt que de dire « Non merci, vous ne sentez pas bon », « Vous guidez trop mal », « Vous transpirez trop »… Votre talent d’actrice entre ici en œuvre. La musique ne vous convient pas, vous être trop fatiguée, bref, les banalités d’usage. Le problème est que le danseur risque de revenir vous inviter plus tard. Si c’est le cas, c’est que vous avez été trop bonne actrice.
Le refus clair mais poli
Finalement, un refus direct mais poli peut être le plus simple et surtout évite qu’un danseur que l’on n’aime pas soit insistant et retente sa chance. Avec un léger sourire, vous pouvez faire un geste discret de la main en disant simplement « Non merci ». Restez immobile, ne laissez pas corps donner un signal contraire. Baissez la tête et continuez de faire ce que vous faisiez (discuter, regarder le piste…).
Le cas des couples
Certains couples viennent en soirée en ayant un accord : pas question de danser avec d’autres personnes. Cela peut être le cas d’amoureux, ou de personnes venues s’entraîner (pour la compétition par exemple). Dites simplement la vérité, comme « Mon mari et moi ne dansant qu’ensemble ». Si vous souhaitez accepter l’invitation (mais que vous ne le pouvez pas, donc), vous pouvez suggérer au danseur de demander l’autorisation à votre partenaire. Il n’est pas rare de voir des danseurs s’adresser au conjoint de la danseuse pour lui demander s’il peut l’emprunter quelques instants.
Nous venons tous pour danser et ne devons pas oublier que les invitations sont une chance. À trop faire la fine bouche, à être trop exigeants, on peut créer une atmosphère qui n’est plus celle de la danse sociale. Personne n’a cependant l’obligation d’accepter de danser avec quelqu’un juste parce qu’il le demande. Il faut alors veiller à ménager les sensibilités, et en toute circonstance, garder le sourire !
Cricou
lun, 23/12/2013 – 09:39
Bel article Herr Mann
Je te rejoins à 90%.
Particulièrement sur les suites à donner à une excuse sincère, circonstancielle, du type besoin de reprendre son souffle après une tanda de milongas, mal aux pieds, je ne danse pas la milonga, etc…
A mon sens, dans ce cas, la personne sincère, homme ou femme, qui a refusé, DOIT systématiquement inviter la personne éconduite lors de l’une des 2-3 tandas qui vont venir. Et si ce n’est pas le cas, la personne éconduite DOIT en prendre acte et ne pas revenir.
Sur les couples, je vois les choses un peu différemment. Si je ne connais pas ces personnes et si je n’observe aucune invitation de l’un ou l’autre vers d’autres personnes ou des invitations qu’eux-mêmes ont acceptées, je n’inviterai pas. Quand à demander à l’homme si je peux inviter la femme, je pense que c’est maladroit vis-à-vis de la femme car cela présuppose des relations dans le couple qui ne sont généralement plus d’actualité, partculièrement dans le milieu du tango.
Mais je le redis, ton article est clair et bien fondé.
Jeanne (non vérifié)
lun, 23/12/2013 – 21:26
Herr Mann
mar, 24/12/2013 – 13:46
Attention, le texte sur « comment refuser une danse » n’est pas de moi puisque je l’ai recopié d’un blog. Il ne m’a semblé pas mal vu, je ne suis pas forcément à 100% sur tout, mais il était intéressant parce qu’il donnait un point de vue féminin, un peu inusité mais quand meme bien pertinent si j’en crois certaines copines.
Autre sujet: je ne crois que si on dit non à une invitation pour une raison conjoncturelle (pas un rejet de fond) on soit obligé d’aller inviter dans les 2 ou 3 tandas qui suivent, ne serait ce que parce que les circonstances ne s’y prètent pas (pas le bon orchestre par exemple, mais aussi pas au niveau d’énergie ou de concentration suffisant, et qu’on a besoin de temps pour recharger l’envie en discutant avec un pote au bar). Mieux vaut ne pas inviter que de le faire par obligation ou par politesse et danser sans aucune présence, sans rien avoir à donner d’autre que sa politesse alors que peut etre deux heures après (ou à la milonga suivante!) on sera sur le bon moment pour tous les deux.
Aller danser en milonga, pour moi ce n’est surtout pas tout danser, avec tout le monde et n’importe comment. Ca existe mais en gros, c’est un truc de débutant un peu dégrossi, et on a une phase où on veut « bouffer de la piste » pour faire monter le score du compteur (je le sais, j’y suis passé, et j’essayais à l’époque de faire danser tout le monde). Mais ensuite, normalement, si on évolue, on entre dans une démarche plus qualitative: on ne danse que sur des musiques qui inspirent et qui peuvent convenir à la partenaire potentielle, et quand on sait qu’on a quelque chose d’interessant à donner. Au delà, il y a un casting plus fin qui se fait: « je danserais bien avec Machine qui est sympa, mais comme elle stresse facilement, il faut que ça tombe sur un truc assez posé style Di Sarli et pas sur une milonga ou d’Arienzo », « je danserais bien une milonga mais là, ce sera assez restrictif: je peux le danser avec A, B, ou C; zut, les trois sont occupées, alors j’attendrai la prochaine tanda de milonga dans un peu plus d’une heure », « je danserais bien avec Une Telle, mais comme c’est une tonique, je laisse passer la tanda de Di Sarli et j’irais l’inviter sur D’Arienzo… en espérant que je ne me fasse pas griller par un autre sur le fil ». Bref un casting qui se fait par rapport à la musique et par rapport aux caractéristiques de danse des partenaires potentielles. Ce qui n’a rien à voir avec une question de niveau, d’ailleurs. Perso, il m’est déjà arrivé de quitter une milonga en n’ayant pas dansé avec quelqu’un que j’aurais souhaité inviter quelle que soit la raison, tout simplement parce que la conjonction de la disponibilité de la personne avec le type de tanda n’est pas survenue ou que cette conjonction est intervenue à un moment où j’ai senti que je n’aurais plus l’énergie nécessaire à donner une interprétation une présence ou un guidage correct.
Herr Mann
mar, 24/12/2013 – 13:57
Sinon, oui, bien sur, un certain nombre de phénomènes facilitent ou pas l’invitation: la proximité géographique dans la salle déjà, surtout s’il y a beaucoup de monde. Le fait qu’il y a déjà des gens dans la salle qu’on connait et avec qui on aime danser (donc ça risque plus facilement d’etre des gens avec qui on est en cours), ceux avec qui on est venu. Le fait aussi à l’inverse qu’il y a quelqu’un qu’on apprécie qui est venu de loin ou qui ne vient pas souvent. Très clairement aussi le placement qu’on a dans la salle va influer sur tout ça. Au fond dans un coin sombre on sera moins invité, au bar on passera plus de temps à discuter et à saluer des gens. Les bavards impénitents en conversation animée risquent eux aussi moins l’invitation…
Jean-Chris (non vérifié)
jeu, 26/12/2013 – 01:07