Catégories
ARTICLES INVITATION PUBLICATIONS RECITS

Il ne m’a même pas regardée!

Vous voulez tout savoir ?

Je m’adresse aux tangueras. À l’approche des festivals d’été il est temps de préciser certaines choses. Vous vous posez la question très certainement : pourquoi ne m’a-t-il pas regardée alors que je le connais depuis si longtemps…il est passé à côté de moi sans même tourner la tête, j’en ai marre de ces individus !

La semaine dernière il était tout sourire nous avons discuté, très sympa…

Aujourd’hui il passe devant moi sans même me regarder ! Mais pour qui se prend-t-il?

Un bon nombre de femmes pensent comme ça. Surtout quand vous êtes assises sur votre chaise depuis de longues minutes et que vous n’arrivez pas à accrocher le regard de tous ces Tangueros qui passent devant vous.

Ce genre de situation arrive le plus souvent dans les grands festivals où il y a beaucoup plus de femmes que d’hommes…La parité est assurée dans les encuentros et dans certains festivals seulement, mais ça c’est un autre sujet…

Un tel déséquilibre met les participants de mauvaise humeur et ne croyez pas mesdames que vous êtes seules concernées.

La position de l’homme n’est pas plus confortable, croyez-moi.

Alors que nous avons grand plaisir à discuter avec vous en temps ordinaire, dans ce genre de situation c’est très différent. Comment choisir parmi vous celle avec laquelle nous allons danser ? Pourquoi vous plutôt que celle d’à côté ou encore 1 m plus loin ? Nous avons aussi l’impression d’être à une foire aux bestiaux ! Alors la solution c’est de repérer de loin une partenaire éventuelle et d’aller très vite vers elle, ou bien de réussir à faire une Mirada… mais c’est quasiment impossible dans ce genre de festival. Bien souvent nous passons très rapidement devant vous sans oser tourner la tête pour vous regarder.

Quelquefois vous venez vers nous, car on se connaît, bien sûr, et vous entamez une conversation amicale qui ne se conclut pas toujours par une invitation, à votre grand regret….Et pendant ce temps une nouvelle tanda démarre. Nous savons que le temps est compté car si nous n’invitons pas rapidement nous allons perdre la possibilité d’inviter la personne que nous avions repérée, et certainement aussi vous faire perdre votre temps parce qu’il est très précieux à ce moment précis…

Sincèrement les filles vous croyez vraiment que l’ami d’hier avec lequel vous vous sentiez bien et qui aimait discuter avec vous a aujourd’hui subitement décidé de ne plus vous reconnaître, de vous snober, d’être désagréable avec vous ?

Le tango dans ces conditions est un « jeu » difficile, où les sensibilités sont à fleur de peau, exacerbées par des situations délicates, la concurrence est rude (il faut être le meilleur pour être remarqué(e)), il faut attendre, décider vite, accepter ou refuser, supporter la fatigue qui nous gagne, rester malgré tout détendu, sourire un peu, faire semblant d’aimer la musique, le décor, l’ambiance…

Alors rassurez vous Mesdames, les messieurs qui passent devant vous et qui font semblant de ne pas vous reconnaître sont autant gênés que vous, il n’y a là aucune mauvaise intention, aucune marque de dédain ou quelconque malveillance à votre égard.

Essayons de rester cool… en conscience que ce n’est facile pour personne.

Bonnes vacances !!

Claude Gosselin

Exprimez vous!

Commentaires de la publication originale:

J’aimerais bien savoir guider afin de proposer la danse aux tangueras, mais jusqu’à ce jour, je n’y suis pas parvenue. Non pas que le guidage soit genré finalement, mais plutôt que je n’ai pas encore réellement appris… Les tangueros convoités ont quelques années de piste et dès qu’ils ont le sésame, leur exigence pour eux-même et pour leur partenaire de tango croît proportionnellement à leur maîtrise du sens du bal. Le sens convivial de la milonga s’estompe… De ce fait, oui, je regarde souvent les autres danser et me manque alors le frisson délicieux, ma bouée: je plonge dans la musique et dans le spectacle ( chorégraphique, comique, sociologique).

Maintenant nous pouvons toujurs créer le tango solo ou le tango de groupe, fi des puristes ou passéistes!

Le monde avance par la transmission de cultures et par l’innovation.

Tranformons-nous grâce à la danse et l’altérité.

Le tango peut être tres très cruel….Chacun et chacune veut à tout prix son dû de plaisir de sensualité de partage et…dans les bras de l’autre c’est un peu intime la préférence et parfois impérieux d’avoir ce cadeau tango plutôt avec celle ci que celle là et vice versa versus fille …en tous cas pour les sollicitées et sollicités…c’est à dire ceux ou celles sûres ou sûrs de danser de toutes façons….Le risque de rater l’objet de son désir peut rendre cruel: des yeux baissés une tête qui se detourne un regard fuyant….il ne s’agit pas simplement d’une reunion conviviale entre copains et copines….S » y joue une scène d’un autre genre où se mêle l’intime….En sorte qu’il faut en accepter la règle….Ce n’est pas une foire ( à celibataires) mais cela y ressemble et nous en sommes les bêtes qui aiment ça…avec des soirées plus heureuses que d’autres ! C’est certainement aussi pour cela qu’on aime le tango …pour cette ambiance un peu erotisee en plus de tout le reste….Moi quand je ne danse pas le spectacle de cette scène me ravit!

Au cours de nos pérégrinations dans les différentes milongas, nous sommes amenés à cotoyer des dizaines de partenaires masculins et féminins, voire des centaines pour les milongueros au long cours. Autant dire qu’il est impossible d’accorder à chaque fois la même attention à toutes ces personnes et de satisfaire les desideratas de chacun. Certaines têtes nous sont familières, de nouvelles apparaissent puis disparaissent, des affinités se créent parfois avec une minorité … mais l’expérience m’a appris qu’au final, on se croise plus qu’on ne se rencontre et découvre réellement … On sourit, on fait bonne figure, on dit 2-3 banalités, on plaisante un peu mais la très grande majorité des relations ou contacts sont de circonstance, passagers … Les moments de sympathie et tandas partagés d’un jour ne sont pas forcément synonymes de « ticket » pour la fois d’après … Le choix est parfois cornélien … De plus, avec les années de pratiques, on a tendance à privilégier les tandas avec des partenaires de niveau équivalent avec qui on a un bon feeling … C’est dommageable pour certaines mais compréhensible aussi … Il faut en avoir conscience et il vaut mieux parfois ne pas en attendre trop des autres … de peur d’être déçu(e)s …

En ce qui me concerne, en tant qu’homme et guideur, j’ai pris le parti de ne plus culpabiliser et de ne plus me torturer l’esprit sur la bonne attitude à adopter … Je reste poli, courtois, bienveillant avec les personnes rencontrées mais je danse avec qui j’ai envie quand j’en ai envie … en fonction de l’ambiance et de l’humeur du moment … sans me soucier du regard des autres … Je n’ai pas à me sentir redevable des états d’âme, des égos et susceptibilités de chacun … on ne s’en sort plus sinon … d’autant plus que 99% des personnes qui fréquentent les milongas vous oublient une fois la milonga terminée …

Le milieu du tango est injuste, rude et les apparences parfois trompeuses. Une fois que l’on sait ça, que l’on connaît les règles du jeu et qu’on arrive à mettre un peu de distance, on arrive peut-être à mieux gérer ses émotions et à passer une bonne soirée … le mieux étant d’être accompagné(e) …

Ainsi va la vie, ainsi vont les milongas…Ce n’est pas l’apanage des hommes de nous ignorer.  J’avoue avoir parfois fait  semblant d’ajuster ma chaussure lorsqu’un tanguero s’avançait  vers moi et que je n’avais  pas envie de danser avec lui  (que celle qui n’a jamais agit ainsi lève le doigt……)
Nous sommes tous changeants, selon notre humeur, l’ambiance, la musique…. Chaque milonga apporte son lot de plaisir ou de tristesse. C’est la loi du tango et c’est pour ça qu’on l’aime

Claudio écrit : « La position de l’homme n’est pas plus confortable, croyez-moi »,… vous y croyez vraiment ? Il faudrait vous plaindre ? Je n’en crois pas un mot, il suffit d’ailleurs d’être en parité voire même dans un rapport inversé (si, si, cela arrive…rarement certes) pour que les comportements changent. Quand je vois passer et repasser certains tangueros devant des dizaines de femmes assises, coq dans la basse-cour, pour finir souvent par s’asseoir, je trouve cette façon de se conduire bien dédaigneuse, personne n ‘est donc à son goût… D’autres attitudes me choquent aussi : ceux qui ne te disent même pas bonjour (on ne va pas leur sauter dessus, je fonctionne uniquement avec la mirada, façon la plus sûre de ne forcer personne et d’être certaine que les deux ont envie de danser ensemble), ceux qui pendant un festival de plusieurs jours ne trouvent pas un moment pour t’inviter, ceux qui te fréquentent souvent et qui t’annoncent que parce qu’ils sont ailleurs ils ne t’inviteront pas …

« La concurrence est rude (il faut être le meilleur pour être remarqué(e) » dites vous … enfin, pour les femmes surtout … Vu la quantité de danseuses en plus, si les tangueras ont vraiment envie de danser, elles acceptent bien souvent des tandas moyennes avec des tangueros d’un niveau bien inférieur au sien. L’inverse est rare… Et je ne parle pas de l’aspect physique : moche, grosse ou vieille même si tu danses bien les invitations seront rares… l’inverse est faux!

« Nous avons aussi l’impression d’être à une foire aux bestiaux! », ça n’évoque pas ça pour moi. Je pense plutôt à celui qui rentre dans un magasin de confiseries, parfaitement achalandé, qui se demande quelle sera la meilleure friandise à consommer à cet instant…et qui fait son marché…. Il peut le faire dédaigneusement, oubliant « l’amie  d’hier »

Non, la situation est inégale, avec souvent beaucoup de souffrances pour les tangueras…  Seuls les encuentros peuvent en partie régler ce problème, mais le reconnaître c’est déjà ça ! On ne va pas vous plaindre!

Il n’est pas douteux que la situation de l’homme n’est en rien comparable à celle de la femme et que cela n’évolue pas au rythme, déjà bien lent, de la société.

Donc oui, sauf rarissimes exceptions, quand je me rends dans une milonga, en tant qu’homme je sais que je vais probablement danser autant que j’en aurai envie et avec la plupart des danseuses que je souhaiterai inviter ou qui m’auront sollicité par mirada ou plus directement si nous nous connaissons.

C’est un confort, si on veut utiliser ce terme, très appréciable, notamment si on ne se sent pas très sûr de son niveau de danseur.

Pour autant, ce n’est pas faux de dire que ce n’est pas confortable (en tous cas pas agréable) de se sentir dans une situation aussi privilégiée du fait du déséquilibre numérique hommes/femmes parfois très important.

Je sais en effet que je ne pourrai inviter toutes les partenaires avec lesquelles j’ai déjà par le passé partagé des tandas voire que je connais très bien et cela me dérange, toujours.

Qu’y faire si ce n’est développer les événements paritaires, avec inscriptions individuelles possibles, tout en sachant que nombre de danseuses seront restées à la porte faute de partenaire disponible ?

Quand il verbalise qu’il devrait se scinder pour contenter tout le monde… La colmena lui répond…

http://www.colmena.fr/2019/08/il-ne-ma-meme-pas-regardee.html